mardi 4 octobre 2011

Rien que la vérité...

Le lecteur, qui cherche uniquement dans un livre à satisfaire la tendance naturelle de son esprit, demande à l’écrivain de répondre à son gout prédominant, et il qualifie invariablement de remarquable ou de bien écrit, l’ouvrage ou le passage qui plaît à son imagination idéaliste, gaie, grivoise, triste, rêveuse ou positive.

En somme, le public est composé de groupes nombreux qui nous crient :
— Consolez-moi.
— Amusez-moi.
— Attristez-moi.
— Faites-moi rêver.
— Faites-moi rire.
— Faites-moi frémir.
— Faites-moi pleurer.
— Faites-moi penser.
Seuls, quelques esprits d’élite demandent à l’artiste 
— Faites-moi quelque chose de beau, dans la forme qui vous conviendra le mieux, suivant votre tempérament.
L’artiste essaie, réussit ou échoue.
Le critique ne doit apprécier le résultat que suivant la nature de l’effort ; et il n’a pas le droit de se préoccuper des tendances.
Cela a été écrit déjà mille fois. Il faudra toujours le répéter.
Donc, après les écoles littéraires qui ont voulu nous donner une vision déformée, surhumaine, poétique, attendrissante, charmante, ou superbe de la vie, est venue une école réaliste ou naturaliste qui prétendu nous montrer la vérité, rien que la vérité et toute la vérité.


Cuy de Maupassant, préface de Pierre et Jean.

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